L'huitre du dimanche matin !

Ce matin, un mollusque a posé dans l'atelier !

Huitre, 18x13 cm, oil on gessoed board

La citation du jour :

Il ne s'agit pas de peindre la vie, mais de rendre vivante la peinture. Pierre Bonnard

La réflexion d'Ernest du jour :

De l'originalité dans l'art. Nous vivons à une époque où la peinture subit comme les autres arts, le malaise d'une transition. Toutes les convictions sont ébranlées, chacun cherche une voie nouvelle, ne voulant pas ressembler à un autre et tous s'empressent, au sortir des ateliers, de répudier les conseils qu'ils ont reçus pour tenter de devenir ce qu'on est convenu d'appeler personnel; il s'ensuit un désarroi puisque l'expérience que les maitres transmettaient à leurs élèves, est devenue inutile.

En effet, de nos jours, la qualité première d'un artiste, c'est l'originalité. Il faut, avant tout, être soi, pour produire une véritable œuvre d'art. Un tableau qui ne montre pas une note nouvelle, est un tableau sans intérêt, car toute œuvre d'un artiste qui évoque le souvenir d'un autre artiste, ne sera jamais une œuvre intéressante. Ce sera tout au plus un objet de curiosité comme l'industrie en fabrique chaque jour.
Les écoles flamande et hollandaise qui furent si célèbres à l'époque de Rembrandt, Van Dyck, Gérard Dow, Teniers, Rubens, etc. doivent leur prospérité à la sécurité dans laquelle vivaient ces peintres. Les élèves recevaient de leurs maitres des leçons que plus tard ils transmettaient à leur tour. Les procédés restaient semblables; tous peignaient avec les mêmes moyens et cependant, ils surent garder chacun leur personnalité.

Nous conclurons donc que les peintres qui naquirent à cette époque, vécurent dans une quiétude qui ne ressemble en rien à notre époque tourmentée, où chacun a soif d'originalité. La vie matérielle était alos plus facile, l'art moins répandu et la concurrence moins active. On n'éprouvait pas le besoin d'inconnu qui nous agite en ce moment. Nous ne pouvons remonter ce courant sous peine d'y être noyé, car il est impétueux et sans digue. Aujourd'hui un artiste qui peindrait à la manière des flamands, fût-il de la force de Rembrandt ne trouverait pas d'admirateur.

La révolution qui s'opère dans la manière de voir et de comprendre la peinture, nous a déjà donné de grands artistes. La recherche de la vérité absolue dans la composition des tableaux a fatalement entrainé les artistes dans le défaut qu'amène toujours chaque qualité. Ils s'occupent, peut-être, trop exclusivement de la copie exacte de la nature et manquent quelques fois de sentiment. Mais nous l'avons dit, nous ne sommes qu'au début de cette école nouvelle si réellement éprise d'art.

Le plein air, si courageusement introduit dans la peinture par Manet, a rafraichi, rajeuni l'Art. Si notre école moderne a perdu un peu de sa poésie, elle a tant gagné en nouveauté et en réalité, elle a ouvert tant de nouveaux horizons, qu'on peut s'attendre à voir naître chaque jour des artistes qui, comme Bastien Leapage, seront la gloire de notre École.
Les peintres sont très nombreux, et chacun voulant apporter sa formule, il s'est produit des tentatives bien curieuses à observer. Aussi, cette originalité, si recherchée de nos jours, s'est-elle montrée sous des formes très diverses. Les uns se sont parfois imaginés tenir la fameuse pierre philosophale en abandonnant brosses et pinceaux, pour se servir exclusivement d'un couteau à palette, avec lequel ils peignent toutes choses, au mépris absolus de la forme. D'autres croyaient avoir mieux trouvé en simplifiant encore et en réduisant l'outillage à sa plus simple expression; ils peignaient avec les doigts, sans brosse, sans pinceau, sans couteau.

Un seul, c'est Courbet, a réussi quelquefois. Il est l'inventeur de cette funeste manière qu'on nomme peindre au couteau. Mais nous nous empresserons de dire que l'emploi du couteau qu'il a introduit dans sa manière n'a rien ajouté à son œuvre. Bien au contraire, il a rarement fait de belles toiles avec ce procédé. En effet, si quelques-unes, comme la vague qui est au musée du Louvre, dont le ciel si beau a été peint au couteau, sont merveilleuses, il en a laissé quantité d'autres inférieures. Ses véritables chefs-d’œuvre : Le combat du Cerf, l'Enterrement à Ornans, la Remise des Chevreuils, son propre Portrait, etc., sont des tableaux qui peuvent être comparés à tous ceux qu'ont peints les maitres anciens et dans lesquels on ne trouve pas trace de couteau ... l'originalité ou la personnalité dans l'art ne s'acquiert pas par tel ou tel procédé.
C'est une erreur profonde de penser que l'on sera original si l'on emploie pour peindre, un outil ou une manière inconnus des confrères. 

L’originalité réside dans la manière de concevoir une œuvre et de la présenter d'une façon personnelle. Pour l'acquérir, il faut ne recevoir ses impressions que de la nature. C'est en travaillant seul avec elle, sans préoccupation des autres artistes, en oubliant surtout leurs œuvres, loin des coteries et des écoles qu'on trouvera une note individuelle.

Le preuve de ce que nous avançons, c'est que les artistes qui ont eu une manière personnelle ont tous quitté l'atelier pour travailler seuls, en s’efforçant d'oublier les principes reçus des professeurs qui enseignent un art de convention et que chaque élève est forcé d'imiter sous peine d'être incompris. Quand on sait dessiner une figure, il faut quitter l'atelier ou le professeur et travailler seul, car les conseils pourraient gêner et faire perdre pour longtemps, quelquefois sans retour, les qualités de naïveté et de sincérité si indispensables à un artiste.

Si l'on a besoin de conseils, on en trouvera toujours de bons en consultant les maitres anciens dans les musées ou collections. Mais nous le répétons, la nature est la véritable source où l'on puise l'originalité. Il est peut être plus long d'apprendre seul, le métier de peintre, il peut se faire qu'on mette plus de temps à acquérir ainsi la science voulue pour faire un tableau. Il est aisé en effet de comprendre qu'on sait plus vite une chose qu'on nous montre, qu'une chose qu'il faut découvrir soi-même, mais, d'un autre côté, il faut, dans l'art, passer bien des années pour se défaire de la science apprise si péniblement. Nous pensons donc qu'il ne faut pas prendre au début de mauvaises habitudes qui coûteraient tant d'efforts quand, en ayant reconnu l'inutilité, on voudrait s'en affranchir.
La maladresse d'un débutant devient en travaillant de l'originalité, s'il est doué des qualités nécessaires à tout artiste. Corot a dit : "Il s'agit moins d'être adroit que de travailler beaucoup pour devenir artiste", et il ajoutait : "Un tiers pour l'aptitude et deux tiers pour le travail, sont des proportions suffisantes pour acquérir du talent et faire un bon peintre." Nous sommes respectueusement de son avis.

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