Cours complet de peinture à l'huile_Natures mortes par Ernest Hareux (extraits)


 Henri Fantin-Latour, Nasturtiums

Le Cours complet de peinture à l'huile_Natures mortes par Ernest Hareux est lisible sur le site Gallica.
Ce post rassemble quelques extraits de l'ouvrage et complète le post Peindre la nature morte.

Quoique la Nature morte ne tienne pas la première place dans l'art de la peinture, nous commençons nos conseils par ce genre que nous recommandons vivement aux commençants. Tous doivent peindre des Natures mortes; c'est indispensable pour apprendre à exécuter, quel que soit le genre auquel on désire se consacrer exclusivement dans l'avenir.
(...) l'exécution est la qualité principale, celle à laquelle on s'attache d'abord dans l'art de peindre des Natures mortes. Cette qualité, au point de vue de l'art pur, n'est cependant que secondaire; ce qui doit tout primer, c'est le sentiment et la poésie, l'exécution vient ensuite.
(...) l'exécution ne doit pas préoccuper l'artiste que dans la mesure où elle lui sert pour traduire ce qu'il ressent devant la nature, mais qu'il faut toujours qu'il ait recours à elle pour trouver l'inspiration. Avoir toujours la nature pour guide ne veut pas dire la copier servilement, comme un certain élève de Corot, qui, en copiant un dessin de son maitre, avait été si consciencieux, qu'il avait imité une tâche d'huile. Le grand paysagiste lui fit observer : que quand il copierait la nature, il la verrait sans tâche.

Lorsque l'on veut apprendre à peindre, il est de toute nécessité pour les commençants de choisir des objets de formes droites, carrées ou rectangulaires, tels que : livres, boites, cartonnages, etc. Ce choix a pour but de familiariser l'élève avec la perspective des lignes fuyantes qui lui apprendront à donner du relief aux objets.

Après quelques études de ce genre, on devra continuer par des objets de formes rondes dont la perspective est plus difficile à exprimer comme la forme des assiettes, des plats ronds ou ovales, des bouteilles, des vases,etc. Il faudra à l'élève de s'habituer à copier chaque objet dans sa grandeur naturelle quand il le peindra isolément. C'est le meilleur moyen de se familiariser avec les proportions, puisqu'on peut comparer directement avec la nature en mesurant exactement la copie avec l'original.
Nous recommandons particulièrement à cet effet de peindre un objet seul, car chacun sait que les objets placés derrière les autres se rapetissent en s'éloignant de l’œil du spectateur et qu'il faut une certaine habitude des comparaisons pour les mesurer et leur donner leurs proportions relatives.

Ces études étant déjà plus difficiles, on commencera donc par peindre un seul objet, un livre, de préférence à tout autre. Ce livre sera placé sur une table quelconque, plutôt haute que basse. La table trop basse a l'inconvénient de donner une perspective montante d'un effet peu agréable en montrant les objets vus du dessus.
La lumière éclairant les objets sera choisie venant de gauche à droite, car c'est le meilleur mode d'éclairage pour travailler; c'est aussi le plus commode pour bien voir les tons sur la palette. (Si l'on se plaçait en sens contraire, la main qui travaille porterait une ombre gênante sur la toile et sur la palette).
Le chevalet doit être éloigné d'une distance 3 fois égale à la plus grande dimension des objets qu'on veut peindre. C'est le recul nécessaire pour bien voir l'ensemble et les proportions de chaque objet.

Après le dessin (brunaille), on commencera l'ébauche en débutant par le fond. Ce fond doit être choisi simple (uni). Les tons sombres et neutres doivent être préférés aux couleurs éclatantes. On devra éviter de peindre les fonds en employant trop de couleur. On ne devra jamais rencontrer d'épaisseur dans un fond bien peint.
On continuera en peignant le dessus de la table. Cette partie de l'étude doit être peinte en demi-pâte, c'est à dire, ni trop liquide comme un glacis, ni trop épaisse comme pour une partie de lumière.
Il est recommandé de commencer toujours par le ton le plus foncé, quel que soit l'objet qu'on ait à peindre. On continuera par le ton médium qui se nomme aussi ton local, et l'on terminera par le ton le plus clair, pour obtenir le modelé et faire tourner l'objet.

Frans Mortelmans

Pour donner de la profondeur aux ombres, il faudra observer que, dans l'ombre même, il y a une autre ombre plus foncée (le repiqué).
Quelque soit l'intensité d'un ton noir, on ne devra jamais employer, pour le peindre, le noir pur tel qu'il sort du tube. La nature ne nous montre jamais un ton noir. C'est toujours un ton plus ou moins foncé qui a une coloration relative aux objets avec lesquels il se trouve placé. Même chose pour le blanc.
Peindre simplement par plans : l'ombre, le ton local et la lumière. L'ébauche ne contient aucun détail.

Les empâtements se montrent dans les parties d'un tableau où se trouve la lumière, jamais les ombres ne sont empâtées, car si on les peignait solidement, avec des épaisseurs de couleur, elles deviendraient lourdes, opaques, bouchées, sans transparence, ni profondeur.
L’empâtement sert à affirmer, par sa solidité, la volonté du peintre, pour attirer la lumière sur la partie qu'il empâte. L'épaisseur même de la pâte, lui sert à obtenir plus d'effet. Les parties saillantes de la couleur accrochant la lumière vraie, donnent de la vivacité aux tons clairs pour lesquels on a épuisé toutes les ressources de la palette.

Pour juger un tableau, il faut s'en éloigner d'une distance 3 fois égale à sa plus grande dimension.
Il faut se lever souvent lorsqu'on peint, se reculer de même, en observant que les détails soient subordonnés à l'ensemble, car si l'on s'apercevait qu'ils attirent les regards à d'autres endroits qu'à celui qu'on veut montrer avant tout, il faudrait les supprimer.

La mise en toile : c'est l'art de bien placer, à l'endroit voulu, les objets qui composent un tableau.
Dans toutes les compositions, il doit se présenter un groupe principal et un groupe de moindre importance. Le groupe principal doit pouvoir s'envelopper dans une ligne ayant la forme d'une pyramide, accompagnée ou relevée à droite ou à gauche par un groupe plus petit.

L'assemblage des objets doit toujours se faire par un nombre impair.
Quand dans un sujet donné, on se trouve obligé de peindre des objets de même hauteur, tels que des pots ou des bouteilles, des corbeilles, etc., il faut s'efforcer de trouver la pyramide en renversant certains objets.

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